Les liens de l'esprit - chapitre 5

Publié le par shadeikin

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Certains habits de Lliane

Chapitre 5 : Evaluation.



    Il était sept heures moins vingt du matin. L’aube fraîche et timide commençait à chatouiller les murs impassibles du château de Gwendalavir. Le léger bruissement de sa robe de chambre trahissait le déplacement de Lliane. Elle arpentait le couloir du dortoir des professeurs, l’air encore un peu endormi ; Mira trottinant à ses côtés. Si bien qu’elle faillit passer devant la porte marquée « Uranus » sans la voir, mais se ravisa à temps. Elle frappa plusieurs fois sans résultat puis entendit enfin du bruit venant de la chambre. Shad ouvrit la porte, les yeux encore embués de sommeil et lui dit bonjour en essayant tant bien que mal de retenir un bâillement. Lliane entra dans la chambre et vit sortir de derrière les paravents deux silhouettes au pas hésitant.

_Rémi : Bonjour Lliane…
_Sébastien : Quelle heure est-il ?
_Lliane : Sept heures moins vingt. Prenez vos vêtements de combat, nous allons commencer par prendre une douche.

    Chacun prit les deux serviettes et la trousse de toilette qu’on leur avait données la veille pour leur première matinée et prit ses vêtements avant d’enfiler une robe de chambre et de sortir de la pièce, sa clé à la main. Ils suivirent tous Lliane jusqu’au palier du deuxième étage où les deux jeunes femmes s’engouffrèrent dans un couloir tandis que les deux jeunes hommes descendaient encore d’un étage.
Lliane fit quelques pas dans le couloir avant d’ouvrir une porte à travers laquelle elle s’engouffra avec Shad. Elles se retrouvèrent dans une vaste salle carrelée aussi bien au sol que sur les murs dans des tons bleutés. Tous les murs ainsi qu’une bonne partie de l’espace central  étaient occupés par des cabines de douche individuelles et des casiers. Certaines élèves, commençant les cours tôt ou voulant s’entraîner avant étaient déjà présentes. Lliane et Shad cherchèrent des places libres et finirent par poser leurs affaires dans des casiers voisins juste avant qu’une autre jeune fille aux fins cheveux d’argent plongeant jusqu’à ses pieds bouclant sur le côté de son visage et aux yeux rubis ne vienne s’installer dans la cabine à côté de celle de Shad. Elle était grande, mince, avec de jolies formes et un teint très pâle.

_Shad : Evangelle Wisper… ?

    La nouvelle venue, intriguée de s’entendre ainsi interpellée, posa sur Shad son regard froid.

_Evangelle : Nous connaissons-nous ?
_Shad : Euh, non… En fait j’ai juste entendu parler de toi, alors j’ai pensé tout haut…
_Evangelle : Vraiment… ?

    Gênée, Shad entra dans sa cabine et retira sa nuisette qu’elle laissa sur la porte. Evangelle fit de même. Comme, dans son monde, Evangelle était le personnage décrit par sa chère Neko, une jeune fille qui l’appelait maman malgré leurs quelques années d’écart ; Shad eut envie d’engager une conversation au travers des étroites cloisons.

_Shad : Je suis arrivée avant-hier à Gwendalavir et je ne resterai probablement qu’un mois… C’est une très belle île, tu t’y plais ?
_Evangelle : Elle a le mérite de nous permettre d’être nous-même sans avoir peur d’être vus par des humains en train de pratiquer la magie ou d’être persécutés pour notre apparence…
_Shad : Ah… Euh… Tu as dû faire des rencontres sympas et te créer des amis ici, non ?
_Evangelle : Pas vraiment… Quand je ne suis pas en cours, j’aime bien aller au cimetière trouver des chairs mortes pour créer mes poupées ou aller dans un endroit calme pour travailler mes pouvoirs de nécromancienne…
_Shad :…
_Evangelle : Je suis mi-humaine mi-spiritless… Enfin mi-zombie si tu préfères…
_Shad : Je savais… Tu sais, je suis quelqu’un de très peu sociable, ce n’est pas facile pour moi de tenir une conversation, alors je n’ai pas de conseil à donner à quiconque en matière de relations sociales, mais… Je suis sûre que tu pourrais trouver profitable de te lier à une ou deux personnes.
_Evangelle : Serais-tu en train de dire que tu voudrais être une de ces personnes ?
_Shad : Je ne dis pas non, mais ce n’est pas non plus ce que je voulais dire… Parce que comme je ne vais pas rester longtemps, ce serait limite méchant de te demander d’être mon amie pour ne plus jamais te revoir un mois après…
_Evangelle : Je ne sens pas de pouvoir magique émanant de toi… Tu dois avoir un grand contrôle de tes pouvoirs pour les dissimuler aussi bien… De quelle espèce es-tu ?
_Shad : En fait, si tu ne ressens rien, c’est parce que je n’ai pas de pouvoir, je suis humaine et… Et merde !

    Shad se reprochait cette dernière phrase. En la prononçant, elle se rappela que d’après sa fiche, Evangelle avait une sainte horreur des êtres humains. Un silence de mort s’installa entre elles avant qu’Evangelle ne se décide à nouveau à parler, une pointe de colère dans la voix.

_Evangelle : Les humains traitent souvent les démons ou les nécromans de monstres, mais sont parfois pires que nous. Et ils sont d’une faiblesse pathétique. Tu ne devrais pas trop t’approcher de moi et quitter cette île dès que tu le peux. Je ne contrôle plus très bien mes pouvoirs depuis deux ans et il existe nombre de gens ici qui n’aiment pas cohabiter avec des humains.

    Sur ces paroles, Evangelle mit sa serviette et sortit de sa douche. Shad la laissa partir avec l’ignoble impression d’avoir fait le même genre d’erreur qu’avec Lliane au restaurant.

_Shad : Je savais bien que les relations sociales n’étaient pas faites pour moi…

    Chaque douche était équipée d’une horloge étanche à affichage numérique. En l’apercevant, Shad revint sur terre et se dépêcha de terminer sa douche et de s’habiller. Quand elle sortit de la salle de bain, Lliane l’attendait dans le couloir, accoudée à une fenêtre. Cette dernière lui sourit et elles prirent le chemin de la salle à manger.

_Lliane : J’ai entendu ta conversation avec Evangelle…
_Shad : Elle ne m’apprécie pas en tout cas, enfin elle me déteste depuis qu’elle sait que je suis humaine…
_Lliane : Je n’irais pas jusque-là, mais il est vrai que pas mal d’entre nous ici ont des préjugés concernant les humains, voir même une totale antipathie. Mais chez les humains aussi, la peur et les préjugés envers les créatures magiques demeurent. Ce sont deux mondes qui ne se rapprocheront peut-être jamais. Mais il ne faut pas dramatiser. Après tout, mes parents et moi avons vécu dans un village humain et des humains vivent ici, en ville et certains viennent même à l’école.
_Shad : Mais Seichiro, Rémus et vous devez quand même nous protéger…
_Lliane : Outre ceux qui pourraient s’en prendre à vous du fait de votre humanité, cette île peut aussi s’avérer dangereuse. Nous nous devons d’être prudents… Mais allez, hauts les cœurs, c’est une belle journée qui s’annonce, le temps est magnifique !
_Shad : Au fait, à quel moment de l’année sommes-nous ?
_Lliane  Au mois de mai.

    Lorsqu’elles arrivèrent dans la salle à manger, Rémi et Sébastien y avaient déjà rejoint Rémus et discutaient autour d’un bout de table encombré de tout ce qu’il fallait pour le petit-déjeuner.

_Rémi : Salut vous deux !
_Rémus : Bien dormi ?
_Sébastien : Nous vous attendions pour commencer.
_Lliane : J’espère que nous ne vous avons pas trop fait attendre.
_Shad : Et oui, nous les filles, nous sommes longues dans une salle de bain.
_Sébastien : Mais non, ne dis pas ça, nous venons d’arriver.

    Shad et Lliane se lancèrent un regard avec un sourire en coin, apparemment, elles aimaient toutes les deux taquiner les hommes de cette façon et Sébastien était une cible facile.
Ils déjeunèrent dans une bonne ambiance avant de sortir du château. Ils traversèrent le parc en direction d’un ensemble de bâtiments d’une taille impressionnante.

_Lliane : Nous allons nous entraîner dans un des gymnases du complexe sportif.
_Rémus : Essayons de trouver un endroit où nous pourrons être seuls. Ce n’est pas la peine de montrer à toute l’école que vous êtes des humains ordinaires.

    Ils traversèrent le complexe où des élèves s’entraînaient au combat, au tir à l’arc, au maniement de diverses armes, faisaient de la gymnastique, de la musculation et autres sports. Les différents bâtiments étaient en effet équipés pour pratiquer toutes sortes de sports individuels ou d’équipe. Le groupe finit par trouver un petit gymnase désert où ils s’arrêtèrent. Lliane regarda une horloge fixée au-dessus de la porte d’entrée, il était sept heures et demie.

_Shad : Par quoi commençons-nous ?
_Rémus : Sortez vos armes.

    Les trois humains s’exécutèrent et Rémus et Lliane touchèrent leurs armes, les entourant d’une sorte de gaine lumineuse grâce à leurs pouvoirs.

_Lliane : Voilà, vos armes ne nous blesseront pas comme ça. Un débutant ne doit pas commencer avec une véritable arme. Nous allons d’abord évaluer votre niveau de départ pour savoir comment nous adapter.
_Rémus : Je propose que nous commencions par un exercice entre Shad et vous et Rémi et moi.
_Shad : Ça paraît logique…
_Rémi : Ça me va.
_Sébastien : Et lequel d’entre vous se chargera de moi ?
_Lliane : Disons que nous ferons une évaluation de cinq minutes pour chacun et je vous laisserai entre hommes pour la tienne. Echauffez-vous d’abord, nous ne sommes pas là pour vous pousser à vous faire un claquage.

    Shad, Rémi et Sébastien commencèrent alors à faire des étirements tandis que Lliane et Rémus s’étiraient dans leur coin en discutant des exercices qu’ils pourraient leur faire faire. Shad et Rémi furent ensuite appelés à faire face à leur adversaire. Le jeune homme mit son bouclier sur son bras droit et prit son épée avec sa main gauche. Shad sortit son katana de sa bourse. Rémus fit alors apparaître sa tri-lames et Lliane sortit sa dague elfique de son fourreau attaché à sa cuisse droite.
    Les deux formateurs se ruèrent sur leurs élèves. Rémi para, Shad préféra esquiver comme elle put. Ils s’en sortirent plutôt bien, Shad tenta de porter un coup qui ne rencontra que du vide, Lliane se mouvant avec légèreté devant elle. Shad porta plusieurs coups avec sa lame, toujours sans succès. Elle décida de ne plus se limiter à son arme. Encore une tentative ratée, mais elle envoya alors un coup de pied qui frôla Lliane. La jeune femme en parut contente, mais ne laissait pas Shad la toucher. Shad maniait son katana comme elle le pouvait, mais n’avait jamais tenu une arme de sa vie et donc était loin de faire le poids. Elle risqua un coup d’œil vers Rémi, ce qui lui valut de parer in extremis la dague de Lliane.
    Apparemment, Rémus s’amusait autant avec Rémi que Lliane avec Shad. Ils n’utilisaient pas leurs pouvoirs, mais les coups de Rémi non plus ne parvenaient pas à toucher Rémus, mais il parvenait tout de même à parer. Les cinq minutes leur parurent durer une éternité puis Rémus et Lliane s’arrêtèrent, les laissant légèrement en sueur. Ils leur donnèrent à chacun une bouteille d’eau, puis Lliane alla s’asseoir avec eux dans un coin pendant que Rémus invitait Sébastien à se mettre en place. Son mètre quatre-vingt-seize de hauteur pouvait être un avantage malgré un léger manque de muscle. Malheureusement, entre un novice qui ne connaît le combat que grâce aux jeux vidéos et un demi-ange qui s’entraîne depuis longtemps, le combat fut aussi inégal que les deux premiers malgré quelques bons mouvements de l’élève. Rémus et Lliane leur demandèrent ensuite de faire des mouvements en avant, les deux mains sur la garde de leur arme pour s’habituer à leur prise en main pendant qu’ils se concertaient.

_Rémus: Nous nous sommes mis d’accord sur un programme d’entraînement.
_Lliane : Tous les soirs, vous devrez faire une centaine de mouvements simples, dans le style de ceux que vous venez de faire avec vos armes avant de dormir dans votre chambre. Vous devrez aussi faire cent abdominaux en ramenant vos jambes au-dessus de votre ventre, c’est plus facile et pour ce que vous avez besoin d’acquérir, ce sera suffisant.
_Rémus : Tous les matins, nous nous retrouverons à sept heures comme ce matin et suivant notre emploi du temps, nous nous relaierons pour vous accompagner dans ce gymnase pour faire de la musculation, de la pure performance physique.
_Lliane : Puis, suivant nos trous de l’après-midi, l’un de nous vous entraînera à la technique avec vos armes et nous travaillerons également à aiguiser vos sens.
_Rémus : En tout, ça vous fera deux heures par jour plus vos petits exercices du soir.
_Sébastien : Ça me paraît raisonnable.
_Rémi : C’est juste pour nous permettre de supporter la potion… Pensez-vous que ce sera quand même dur à gérer ou que nous n’aurons pas trop de problème comme ça ?
_Lliane : Je pense que ça ira très bien. Des humains possèdent parfois des dons et s’en sortent très bien et vous m’avez l’air solides, vous devriez vous en sortir sans problème avec la potion.
_Shad : Mais… Shiro a dit qu’il y avait des pouvoirs dans nos armes, est-ce qu’avec l’effet de la potion, on ne risque pas de perdre le contrôle ?
_Lliane : C’est un des objectifs de l’entraînement. Vous allez devoir apprendre à vous contenir.
_Rémus : Bon ben, on va changer d’activité maintenant que nous avons pu se faire une idée.

           Ils rangèrent leurs armes dont la protection était restée en place. Ils quittèrent le gymnase dans la brise fraîche d’une matinée de printemps. Ils rejoignirent un autre bâtiment où quelques personnes utilisaient certaines des très nombreuses machines de musculation présentes. Et ce fut le début de la douleur pour nos trois héros dont le corps perdit autant d’eau pendant trois quarts d’heure que pendant toute une journée de canicule. Après quoi, ils purent enfin aller reprendre une douche et boire de grandes rasades d’eau fraîche. De retour dans la chambre « Uranus », Lliane et Rémus devaient prendre congé pour le cours de neuf heures.

_Rémus: Bon, j’ai un cours de potions.
_Lliane : Moi aussi je vais devoir y aller. On vous laisse là ?
_Shad : Je veux bien.
_Rémus : Oui, vous nous avez cassés.
_Sébastien : Ce n’est pas de refus…
_Lliane : Bien, reposez-vous, je vais envoyer un message à Seichiro pour qu’il vous accompagne dans une bonne demi-heure à vos activités.
_Rémus : Il n’aura pas trop de trajet à faire. Il faut emmener Shad en ville, mais sinon, Sébastien reste avec lui et le cours suivant de Rémi est celui de défense contre les forces du mal.
_Shad : Pratique…
_Lliane : Bon, ce n’est pas tout ça, nous allons être en retard. Nous nous verrons ce midi à la cantine.
_Rémus : Ok, à tout à l’heure.
_Sébastien : Travaillez bien.
_Shad : Bon courage.

    Lliane fit alors apparaître un petit morceau de papier et un crayon et griffonna quelques mots avant de le glisser dans le collier de sa chère Mira, allongée sur ses épaules. Elle lui murmura ensuite à l’oreille d’aller porter ce mot à Seichiro. Le fennec sauta alors à terre après avoir frotté sa tête contre sa maîtresse et sortit d’un pas pressé par la porte restée ouverte. Lliane et Rémus sortirent à sa suite et fermèrent la porte de la chambre où Shad, Rémi et Sébastien décidèrent d’aller s’écrouler sur leurs lits en attendant que Seichiro vienne les chercher.  
Pendant ce temps, dans la salle des professeurs, le vampire de ces dames parcourait des copies d’élèves avec un œil  critique quand il sentit une petite vague de magie, provoquée par Mira qui était passée à travers la porte de la salle. La brave petite bête vint sauter sur les genoux du prof en lui tendant le cou. Seichiro remarqua le papier qui y était coincé et le dégagea, laissant Mira descendre et rejoindre Angeline, la renarde blanche à neuf queues et le lapin blanc de Seichiro. Le vampire soupira.

_Seichiro : Bon… D’ici une demie-heure, je devrai aller jouer les nounous… J’espère que Lliane et Rémus auront assez de temps libre pour gérer tous les entraînements…

                                    

 

 

_Sword : B’jour…
_Seichiro : Ah… Bonjour…

    Sword, le professeur de combat et gardien du cimetière, venait de faire son entrée, suivi de son larbin habituel, Sagis, qui cette fois avait une apparence masculine. Le dragon était passablement énervé, car il était dans cette salle pour venir remplir de la paperasse pour ses cours et que Sagis lui demandait une énième fois de bien vouloir coucher avec lui.
Il laissa tomber négligemment ses cent-soixante-quinze kilos élégamment répartis le long de ses deux mètres trente de hauteur musclés sur la chaise de son bureau. Il releva les mèches de ses cheveux courts d’un noir de jais qui lui tombaient devant ses yeux violets aux reflets turquoises et rouges. Sagis s’assit sur le bureau. Sword lui posa alors sa main très bronzée sur la cuisse et le fit basculer sur le côté.

_Sagis : Vous voulez enfin me prendre maître… Et sur un bureau devant témoin, c’est excitant…
_Sword : Mais non crétin ! Tu t’es assis sur le dossier que je dois remplir !

    Sword commença à remplir le dossier. Seichiro l’avait observé tout ce temps en réfléchissant et se décida à se lever et à aller l’aborder.

_Seichiro : Monsieur Fylbers ?
_Sword : Quoi… ?
_Seichiro : J’ai un service à vous demander…

    Neuf heures et demie, Seichiro frappa à la porte « Uranus » et invita ses occupants à le suivre, leur laissant à peine le temps de fermer la porte à clé. Comme Sébastien dépassait le mètre quatre-vingt-cinq du vampire, il lui était plus facile de suivre ses grandes enjambées pressées qu’à Shad qui devait presque trottiner pour rester à côté d’eux. Rémi, grand lui aussi, n’eut pas de difficulté. Une fois arrivés devant le croissant de la lune blanche, Seichiro leur distribua une feuille à chacun. Cela consistait en une sorte de formulaire d’inscription où il avait noté leurs noms, leur race, leur manque de pouvoir, certaines caractéristiques physiques, leurs âges et les armes qu’ils avaient achetées ainsi que leur niveau et matière d’auto-défense.

_Seichiro : Ce midi, ne traînez pas pour rentrer au château et manger, vous devrez vous présenter dans la salle indiquée sur vos feuilles à deux heures moins le quart. C’est dans le bâtiment central. Lliane passera te chercher Shad, travaille bien.
_Shad : Merci et bon cours.

    Les trois hommes laissèrent Shad entrer dans la boutique et repartirent aussi vite qu’ils étaient venus. Les fiches qu’ils avaient reçues laissaient les trois humains perplexes. D’autant qu’ils savaient que le bâtiment central du château était réservé aux salles de cours. Fait qu’ils purent à nouveau constater en suivant Seichiro jusqu’à la salle où il allait donner son cours. Ils n’étaient pas en avance et rencontrèrent plusieurs élèves qui saluèrent leur professeur avant de le suivre à distance convenable, cette même distance que les élèves de collège et de lycée appliquent pendant les cours et qui amène les derniers arrivés ou les punis au premier rang.
Rémi remarqua alors que les élèves avaient des blouses et questionna l’un d’eux.

_Rémi : Vous avez besoin de blouses de chimie en cours de potion ?
_Élève : Oui, regarde.

    Il déplia devant Rémi sa blouse constellée de taches de différentes couleurs.

_Rémi : Ah ouais, quand même… Il vaut mieux en avoir une…
_Élève : Nous avons parfois des lunettes de protection aussi ; parce que des fois, il y a de petites explosions, des giclées bizarres et même si toi tu fais bien ton travail, celui du voisin peut t’atterrir dessus.

    Ils entrèrent dans la salle de cours. Contrairement à celle de Lliane, les tables y étaient disposées « normalement ». La salle était très spacieuse, bien trop pour le nombre de tables. Mais comme dans toutes les salles de classe de gwendalavir, les murs étaient longés d’armoires, de coffres, d’étagères. Mais dans celle-ci, de nombreux meubles étaient recouverts de draps et Rémi supposa qu’il s’agissait de cages étant donnés les petits cris, rugissements, couinements ou chants qui s’en échappaient.  
Ils prirent tous place puis Seichiro s’éclaircit bruyamment la voix pour réclamer le silence. Sébastien s’était vu attribuer une table juste à côté de son bureau.

_Seichiro : Je vous ai déjà présenté mon assistant, Sébastien. Je dois vous dire qu’il n’est pas venu ici seul, je vous présente Rémi. Il est en quelques sortes l’hôte de l’apothicaire de la ville et repartira vraisemblablement en même temps que Sébastien. Vous êtes prié de lui faire bon accueil.

    Rémi sentit alors peser sur lui les regards interrogateurs que doivent subir tous les nouveaux arrivés en cours d’année. Il entendit également les murmures habituels : « D’où vient-il à ton avis ? », « pourquoi est-il transféré maintenant ? », « il a l’air sympa ». Mais aussi d’autres que l’on n’entend pas dans les écoles humaines : « de quelle race est-il à ton avis ? », « je me demande s’il est bon en combat», « à ton avis, quelles armes a-t-il ? Il se bat peut-être juste avec ses pouvoirs », « Crois-tu que son espèce est biologiquement compatible avec la nôtre ?».
Seichiro donna quelques tapes avec sa main sur le bureau pour réclamer le silence ; le cours avait commencé.

_Seichiro : Bien, aujourd’hui, il sera question des serpents de mer… Quelqu’un peut-il éclairer la salle d’une remarque là-dessus ?
_Elève : Les spécimens les plus grands vivent dans les mers froides au-delà de l’Europe du nord. Mais d’autres vivent un peu partout.
_Seichiro : C’est vrai. Les humains d’ailleurs ne veulent pas croire en leur existence. Cette appellation de serpent de mer regroupe de nombreuses espèces dont L'anguilliforme géant ou encore le saurien océanique. Maintenant, dîtes-moi donc quel est le premier et le plus grand des serpents de mer qui ait existé… ?
_Elève : Jörmungand…
_Seichiro : Exact, et qui est-il exactement ?
_Elève : Le fils du Dieu nordique Loki et de la géante Angrboda…

    Seichiro semblait satisfait, son cours accueillait quelques élèves instruits qui avaient timidement, mais brillamment répondu à ses questions.

_Seichiro : Bien… Il est le frère du loup géant Fenrir et de la déesse des morts Hel. Il grandit aussi vite que son frère et Odin dû le jeter dans l’océan. Il entoura alors le monde entier, pouvant même se mordre la queue et contribuant ainsi à la stabilité des océans. Et qu’est-il advenu de lui ?
_Elève : Il est mort lors de la bataille de Ragnarok…
_Seichiro : En effet. Il était sorti de l’océan pour se joindre aux géants. Thor lui a alors donné un coup si violent que sa tête explosa, mais le venin contenu dans sa bouche tomba sur Thor qui mourut à son tour. Cela donne une idée de la puissance de son venin, mais même s’il est considéré comme le père de la plupart des races de serpents de mer, ses descendants n’ont ni sa taille ni des pouvoirs aussi développés. Néanmoins, ils  sont quand même à prendre relativement au sérieux. Ils peuvent atteindre jusqu’à soixante mètres de longs et sont presque tous venimeux. Il faut savoir s’en protéger, mais aussi les sauvegarder, car au-delà de la biodiversité, ils ont des propriétés intéressantes.

       Seichiro se détourna de ses élèves pour aller vers le tableau et y dessina un grand serpent en cercle qui de mordait la queue. Il se retourna ensuite vers l’assemblée et tapota le tableau avec sa craie à côté du dessin.

_Seichiro : Qui saura me dire ce que c’est ?
_Elève : Un ouroboros.
_Seichiro : Mais encore ?
_Elève : Euh… Un symbole très ancien et qui possède des interprétations contradictoires. Il… Il peut désigner l’immortalité, le recommencement perpétuel des cycles de vie… Mais aussi, comme il se mord la queue, il peut représenter la destruction.
_Seichiro : Bien, ouvrez vos livres page trois-cent-quatre-vingt-quatorze.

    Pour qu’il ne reste pas à s’ennuyer pendant les cours, Seichiro avait prêté un livre de sa matière à Sébastien, intitulé « créatures magiques et sors, comment s’en protéger, comment les utiliser ? ». Rémi quant à lui, regarda sur celui de son voisin que ce dernier avait posé entre leurs deux tables. À la page indiquée commençait un chapitre sur la façon d’éloigner ou d’invoquer les serpents de mer. Un ouroboros prenait une bonne partie de la place sur la première page.

_Seichiro : Les ouroboros sont des symboles très forts, relatifs à des concepts contradictoires, et donc devant être manipulés avec précision pour obtenir l’effet souhaité. Il peut aider à ressusciter l’âme d’une personne, mais aussi être utilisé dans des incantations de destruction en étant associé à des formules. Il peut aussi, s’il est disposé aux quatre points cardinaux et associé à un bassin purificateur placé au nord de la zone protégée, constituer une protection contre les serpents de mer. C’est d’ailleurs ainsi que nous les protégeons en leur créant des réserves naturelles délimitées par ces Kekkai pour les tenir éloignés des humains. Je vais vous faire une démonstration.

    Le professeur alla près d’un mur et en rapporta un chariot sur lequel était disposé un objet volumineux et parallélépipédique recouvert d’un épais voile mauve foncé. Il l’amena à côté de son bureau sur lequel il posa un petit bout de viande fraîche et dessina des ouroboros aux quatre points cardinaux sur le bois en s’aidant d’une boussole. Enfin, il disposa sur le dessin orienté au nord une petite coupelle de porcelaine remplie d’eau. Il releva ensuite le tissu mauve, découvrant un aquarium dans lequel nageaient une vingtaine de minuscules serpents de mer, à peine de la taille d’un avant-bras. Le vampire utilisa la télékinésie pour en faire sortir un et le posa sur le bureau à l’extérieur de Kekkai. Le reptile flaira rapidement l’appât et tenta de s’en approcher, mais dès qu’il atteignait le bord du bouclier, il s’arrêtait net et tentait de le contourner. Il finit par aller se cacher derrière le livre que Seichiro avait laissé ouvert sur son bureau, ne détachant pas son regard de la viande, comme s’il attendait qu’elle sorte de la protection pour pouvoir se jeter dessus. Seichiro rompit le kekkai et donna la viande au serpent avant de le remettre dans l’aquarium.

_Seichiro : Il y a assez de spécimens pour tout le monde. Ils viennent tout juste d’éclore, ils n’ont donc pas encore de venin et ils appartiennent à une espèce d’eau douce qui vit notamment dans notre lac et qui n’est pas très grande. Venez en chercher chacun un avec un bâton à serpent ainsi qu’un appât, une coupelle et une boussole. Dessinez et placez correctement les symboles pour leur faire une cage. Servez-vous de votre livre.

    Les élèves se levèrent et vinrent chercher le matériel. Pendant que son voisin allait chercher ce qu’il fallait, Rémi lisait le livre pour savoir s’il y avait des détails importants que Seichiro n’aurait pas mentionnés. Quand l’élève revint à sa place, Rémi lui tendit le livre en pointant un schéma du doigt.

_Rémi : Regarde, les ouroboros ne sont pas mis de la même façon sur les deux dessins.
_Élève: Fais voir… Au fait, je m’appelle Raven.
_Rémi : Enchanté… Sur la première figure, comme sur le bureau de Sei, leur tête est tournée vers l’extérieure de la zone, mais sur le deuxième, elle est tournée vers l’intérieur…
_Raven : Hum… Apparemment, d’après ce qu’ils disent, ça dépend de ce qu’on veut faire. Si on veut les enfermer, il faut tourner les dessins vers l’intérieur de la zone, alors que si on veut les empêcher d’entrer, il faut les tourner vers l’extérieur de la zone à protéger.
_Rémi : En fait, il faut toujours que le dessin « regarde » le serpent… Et la coupelle, ça sert à quoi ?
_Raven : Dans un kekkai, un récipient d’eau propre placé au nord sert à éloigner les mauvais esprits.

    Raven fit participer Rémi. Ce dernier déterminait l’emplacement des ouroboros que dessinait Raven, qui devait, par ailleurs surveiller le serpent. Une fille poussa un cri quand le serpent d’un garçon échappa à sa vigilance pour se jeter sur l’appât de la jeune fille. Un élève fut légèrement mordu, mais les crocs de l’animal n’étaient pas encore très développés, il n’eût donc besoin que d’un pansement et Seichiro leur reprocha leur manque de vigilance.

_Seichiro : Si vous n’êtes pas plus sérieux, devant un serpent adulte, vous serez dévorés.

    Le cours se termina sur une prise de notes sur les utilisations possibles du venin de certaines espèces en potion et en médecine ainsi que sur les propriétés des écailles des serpents de mer. La cloche sonna enfin, couvrant les gargouillements des estomacs impatients. Seichiro libéra ses élèves et Rémi et Sébastien attendirent qu’il ait rangé ses affaires et fermé la porte avant de se diriger vers la salle à manger en discutant du menu qu’ils aimeraient avoir.

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PS : Alors, qui a vu le clin d'oeil à Harry Potter 3 ?

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