Les liens de l'esprit - chapitre 7

Publié le par shadeikin

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Un dessin de Lliane raté sur un tableau véléda de la faculté de sciences de Nantes ^^.

Chapitre 7 : Raz de marée



    Une semaine et demie. Cela faisait maintenant une semaine et demie que Shad, Rémi et Sébastien étaient arrivés sur l’île, bien réelle, de Gwendalavir. Ce matin-là, ils n’auraient pas cours, le week-end les en dispensait. Il fut donc décidé par le groupe d’aller à la piscine du complexe sportif. Ils se levèrent à huit heures du matin et traversèrent les couloirs quasiment déserts du fait de l’heure matinale en ce jour de congé et du fait qu’une partie des élèves passait le week-end en dehors de Gwendalavir. Une bonne douche et un petit-déjeuner léger précédèrent la recherche des maillots de bain dans les chambres Mercure, Mars et Phobos. Rémus prêta des affaires à Rémi, Lliane fit de même pour Shad et Sanne fouilla la commode de Seichiro avant que ce dernier ne puisse réagir pour prêter de quoi aller à la piscine à Sébastien. Ils se retrouvèrent ensuite tous dans le hall, à l’exception de Seichiro, car du fait de sa condition de vampire, les grands bains ne l’attiraient pas vraiment. Ils prirent alors le chemin du complexe à travers le parc. Stephan était chargé de veiller à la bonne tenue de la piscine. Une fois qu’il en avait ouvert les portes, l’entrée était libre. Il y avait deux vestiaires : un pour les hommes et l’autre pour les femmes. Chacun entra dans celui qui lui était attribué. Une fois sortie de sa cabine, Shad fut prise d’un doute.

_Shad : Euh… Dis Lliane… Comment les casiers fonctionnent-ils ici ? Faut-il une pièce ?
_Lliane : Non, tu vas voir… Les casiers occupés sont de couleur rouge et ceux qui sont libres sont verts.

Lliane se plaça devant un casier vert et, au plus grand étonnement de Shad, lui dit bonjour. L’objet possédait deux molettes munies de chiffres vers le haut en une petite fente dans la partie basse. Lorsque Lliane lui adressa la parole, les molettes tournèrent un peu et la fente dans le métal commença à se mouvoir telle une bouche.

_Casier : Bonjour mesdemoiselles. Voulez-vous déposer vos affaires toutes les deux ?
_Lliane : Oui, s’il vous plaît.

    Les molettes tournèrent soudain très vite et le casier s’ouvrit. Les jeunes femmes déposèrent leurs affaires, puis Lliane signala au casier qu’il pouvait se refermer. Elle expliqua ensuite à Shad que ces objets étaient ensorcelés pour reconnaître les personnes qui y avaient déposé leurs affaires et être impossibles à forcer, rendant donc impossible tout vol.
    Elles se dirigèrent vers la salle principale du bâtiment, c’est-à-dire les bassins, en passant par un pédiluve à la sortie de leurs vestiaires qui faisait face à celle des hommes. La piscine avait une taille impressionnante : deux grands bassins d’entraînement de cinquante mètres de longueur avec six couloirs de deux mètres de largeur et des plongeoirs, un sauna, des jacuzzis, un grand bassin à vagues relié à une « rivière sauvage » et bien sûr, un bassin classique partant de quatre-vingt centimètres de profondeur pour descendre en pente douce jusqu’à atteindre deux mètres. Et le tout était agrémenté d’un décor de rêve avec de magnifiques parterres de palmiers et plantes tropicales séparés des allées par des barrières de bois. Les deux jeunes femmes allèrent retrouver les hommes près du bassin classique en saluant Stephan au passage, ce dernier étant perché sur sa chaise de maître-nageur, une chemise, style hawaïen, laissée ouverte par-dessus son bermuda de bain. Rémi, Rémus et Sébastien regardèrent s’approcher les deux jeunes femmes qui portaient un maillot une pièce de piscine semblables, hormis le fait que Lliane avait des motifs bleus clairs sur fond noir et que ceux de Shad étaient magentas.
Rémus portait un boxer de bain noir orné de symboles tribaux oranges sur les côtés et Rémi un maillot similaire avec des symboles bleus nuit. Quant à Sébastien, il portait un short de bain rouge sang.
    Leur échauffement commença, consistant à jouer comme des gros gamins dans l’eau avec un ballon. Ils se firent toutes sortes de passes : passes hautes, smash, belle cloches, gros ricochets dans la figure, toujours en faisant attention de rester dans une zone où les quelques autres élèves présents ne risquaient pas de se prendre une « balle perdue ». Jusqu’au moment où Shad rata sa réception, laissant le ballon sortir de la piscine. Elle allait sortir le récupérer quand quelqu’un le lui tendit.

_Shad : Osa… Euh… Mademoiselle Yukime !
_Osaya : Bonjour à vous ! Vous amusez-vous bien ?
_Rémus : C’était histoire de s’échauffer avant d’aller faire des longueurs.

    La directrice portait un maillot deux pièces azur avec un haut en triangle, faisant baver les quelques mecs alentour avec ses formes généreuses. Elle se joignit à eux, la partie de gros n’importe quoi se changeant en un genre de beach volley aquatique. Ils sortirent ensuite de l’eau pour rejoindre un bassin d’entraînement et Stephan descendit de son perchoir pour saluer comme il se doit sa patronne qui avait été prévenue de sa malédiction.

_Stephan : Bonjour mademoiselle la directrice.
_Osaya : Bonjour Stephan. Pas de problème ?
_Stephan : Non, aucun directrice. Hormis le trèfle à quatre feuilles séché sous plastique et la patte de lapin que j’ai toujours sur moi et qui me préservent un peu, j’ai disposé des sorts de chances tout autour de la piscine pour ne pas être ennuyé dans mon travail.
_Osaya : Très bien ! Vos dispositions ont l’air d’être efficaces.
_Stephan : Oui, croisons les doigts, je pense que la journée sera tranquille.

    Stephan avait prononcé une phrase à ne pas dire, ravivant sa malédiction. La piscine était équipée d’un toit translucide ouvrant qui avait été relevé étant donnée la température plus que bonne en cette matinée printanière. Mais le ciel s’assombrit brusquement et une mini-tornade vint se mêler à l’eau du bassin classique, créant un grand tourbillon d’eau. Lliane et Rémus tentèrent de mettre leurs protégés à l’abri tandis que Stephan se jetait à l’eau pour aider les élèves qui se débattaient dans le bassin.

_Osaya : Rémus, s’il vous plaît, veillez sur vos invités et Lliane, aidez Stephan à faire évacuer les élèves, je vais tenter de calmer ça.

    La directrice, mi-humaine, mi-déesse des océans se précipita vers le typhon pour tenter de le calmer avec ses pouvoirs. Malheureusement, elle glissa sur une flaque d’eau et se retrouva projetée dans le bassin. Voilà pourquoi il ne faut jamais courir au bord d’une piscine. Totalement à l’aise dans l’eau, elle n’eut aucun mal à reprendre pied, mais elle s’aperçut alors que le haut de son maillot avait été arraché par la violence du courant. Elle poussa alors un cri aigu et se cacha dans l’eau après avoir couvert sa poitrine avec ses mains.
Rémus, Lliane et les trois humains avaient trouvé refuge dans les vestiaires et y avaient ramené plusieurs élèves dont certains étaient choqués ou légèrement blessés à causes de débris volant en tous sens, soulevés par le vent. Lliane se servait de ses pouvoirs de métamorphose pour ressouder de petites plaies et de la télékinésie pour en enlever des débris.  Shad aidait à marcher un jeune homme qui s’était pris un éclat de bois dans la jambe ; Sébastien portait une jeune fille que Stephan venait de sauver de la noyade et Rémi en aidait une autre à reprendre conscience tandis que Rémus installait un kekkai pour empêcher les débris de briser la vitre donnant sur les douches des vestiaires.


_Lliane : Le kekkai est-il prêt ?
_Rémus : Oui, pas de soucis. Mais la directrice tarde à régler le problème.
_Lliane : Tu as raison, c’est étrange. Je te laisse donner les premiers soins aux élèves, tes connaissances d’apothicaire seront utiles. Je vais voir ce qu’il se passe.

    Lliane courut alors dans la salle principale, laissant Rémus gérer les blessés. Le typhon faisait toujours rage et Stephan se battait contre le courant quand quelque chose lui fouetta soudain le visage, le laissant dans le noir.

_Stephan : AHHHHHHHHH ! MES YEUX ! JE SUIS AVEUGLE !!!
_Lliane : Stephan ! C’est vous ? Où est la directrice ?
_Stephan : Lliane ? Je ne vois plus rien !!
_Lliane : Arrêtez de faire l’idiot !

    Stephan recouvra soudain la vue et vit Lliane métamorphosées en sirène. Cette dernière l’avait rejoint, alarmée par ses cris. Elle tenait à la main un haut de maillot que Stephan identifia comme étant celui qu’il avait vu sur Osaya. Il rougit en se rendant compte que c’était ce bout de tissu qui était venu lui fouetter le visage et était resté sur ses yeux.

_Lliane : Alors, avez-vous vu mademoiselle Yukime ?
_Stephan : Elle n’était pas sur le bord avec vous ?
_Lliane : Non, elle était supposée arrêter ce cirque !
_Stephan : Je ne l’ai pas vue…
_Lliane : Vous devriez sortir de l’eau et vérifier qu’il n’y a pas d’élève blessé quelque part. Vu qu’elle a perdu son haut de maillot, il vaut mieux que je cherche la directrice seule.
_Stephan : Vous avez raison.

    Stephan sortit alors de l’eau et entreprit de faire le tour du bâtiment tandis que Lliane était restée dans le bassin, hurlant le nom d’Osaya à pleins poumons.

_Osaya : Lliane ! Je suis là !

    La directrice avait enfin répondu. Lliane la retrouva cachée dans un coin, toujours à cacher sa poitrine et l’aida tant bien que mal à remettre son maillot malgré les vagues et le vent. Osaya s’excusait de sa maladresse, mais Lliane l’interrompit et la pria de se concentrer sur la tornade. La jeune femme, de nouveau présentable, se fondit alors dans l’eau et alla à la base de la tornade vers laquelle elle étendit les bras avant de rayonner. L’eau se calma alors progressivement. Les vagues se firent de moins en moins hautes, le courant de moins en moins fort et les nuages, eux aussi composés d’eau, se dispersèrent lentement. La piscine retrouva enfin tout son calme. Lliane entreprit alors de réparer les dégâts, grâce à ses pouvoirs, comme elle l’avait fait dans la chambre Phobos. Osaya avait réussi à reprendre contenance après le cri de collégienne que la perte de son maillot lui avait fait pousser et avait envoyé Stephan et Rémus chercher Sanne et Kira. Stephan revint avec Kira,  qui alla voir Lliane, toujours en train de réparer les dégâts. Il tenait négligemment sa veste jetée sur son épaule droite et avait défait davantage de boutons de sa chemise que d’habitude sous sa cravate à peine nouée, pour mieux supporter la chaleur de la piscine.

_Kira : Et bien… Vous ne vous ennuyez pas ici… Mais au moins, j’aurais eu le plaisir de vous admirer en maillot de bain… Dommage qu’il ne soit pas en deux pièces.
_Lliane : Je préfère les maillots une pièce qui tiennent bien pour faire de la natation sportive ; c’était mon but premier d’ailleurs. Je pense qu’il va falloir sérieusement penser à aider Stephan pour sa malédiction. J’ai fait le tour de la piscine pour réparer les dégâts, et j’ai constaté que les sorts de chance qu’il avait utilisés étaient puissants.
_Kira : Toujours votre grande âme ! Je vous reconnais bien là ! Le plus efficace serait de retrouver celui qui l’a maudit.
_Lliane : Le problème est que c’est son propre fils qui l’a maudit et qu’il est chasseur de prime, il peut être n’importe où. Et puis, grandeur d’âme, je ne sais pas. Bien sûr, je serais contente de pouvoir l’aider, mais il y a aussi le fait que c’est parfois limite dangereux d’être dans la même chambre que lui.
_Kira : Bof… La bonne nouvelle, c’est que chasseur de prime, c’est un métier dangereux. S’il meure, la malédiction sera levée.
_Lliane : Des fois, je me demande pourquoi vous êtes psy. Et d’ailleurs, ne devriez-vous pas vous assurer que les élèves n’ont pas été trop choqués ?
_Kira : Si, je vais y aller. J’attendais que Sanne avance dans son inventaire, si j’ose dire. Rémus lui a apparemment fait un rapport détaillé des blessures qu’il a soignées et elle va voir chaque élève pour s’assurer que tout va bien. Mais, comme elle a l’air d’en avoir déjà vu deux ou trois, je peux commencer mes entretiens je suppose…
_Lliane : Faites donc, j’ai encore du travail.

    Les élèves n’avaient rien de grave et allèrent vaquer à leurs occupations après avoir récupéré leurs affaires. Stephan vint remercier Lliane d’avoir tout remis en état et celle-ci lui proposa de commencer de sérieuses recherches sur son fils quand les trois humains seraient repartis. Après tout ce travail accompli, les estomacs commençaient à se faire entendre. Ils retrouvèrent donc Seichiro à la cantine et leur comptèrent leurs mésaventures.

 

_Seichiro : Et bien, je remercie ma condition de vampire qui m’a poussé à ne pas vous accompagner.
_Shad : Remarquez, ce n’est pas plus mal pour les élèves que Lliane et Rémus aient été là.
_Rémi : C’est clair. D’ailleurs, celui que tu as aidé à marcher était bien content. Il t’a maté de haut en bas.
_Shad : Roooo, c’est bon ! De toute façon, il fallait bien que je l’aide, il avait la jambe en sang !
_Sébastien : Et sinon, que faisons-nous quoi cet après-midi ?
_Lliane : J’avais pensé à entraîner votre esprit.
_Shad : C’est-à-dire ?
_Rémus : Un entraînement spirituel vise à accroître la capacité de concentration, aiguiser les sens et vous aider à mieux ressentir les choses qui vous entourent.
_Sébastien : C’est sûrement moins fatigant qu’un entraînement physique.
_Rémus: Et bien, pas forcément, ça peut être éreintant.
_Seichiro : Et où avez-vous prévu de le faire ?
_Lliane : Je ne sais pas encore, mais j’avais pensé qu’un lieu naturel serait plus approprié, parce qu’on peut y ressentir beaucoup de choses.
_Seichiro : Dans ce cas, pourquoi n’irions-nous pas en forêt ?
_Lliane : Diantre ! Vous proposez-vous de venir avec nous ?
_Seichiro : Ne vous moquez donc pas. Profitons donc de ce beau week-end. Un tour en forêt nous fera du bien.
_Rémus : Adjugé ?
_Shad : Vendu.
_Rémi : Vendu.
_Sébastien : Idem.

    L’idée étant donc acceptée, ils finirent tranquillement leur repas, avant de sortir du château et de se diriger tranquillement vers l’orée de l’étendue verdoyante qui recouvrait une bonne partie de l’île. Peuplée de toutes sortes d’animaux et d’esprits, la forêt était parfaitement entretenue. Aucun arbre mort, aucune plante malade. Ils marchèrent, revêtus de leurs habits de combat à travers les chemins forestiers relativement larges et peu caillouteux. Ils s’arrêtèrent dans une vaste clairière. Les trois humains s’assirent au milieu de l’étendue plane et regardèrent leurs alter-ego qui avaient disposé des encensoirs autour d’eux. Une étrange fumée bleutée se répandit.   

_Sébastien : À quoi sert cette fumée ?
_Seichiro : C’est un encens spécial qui aide à la concentration, à la méditation et aiguise les sens.
_Shad : Que devons-nous faire au juste ?
_Rémus : Relaxez-vous pour commencer. Fermer les yeux et essayez de ne penser à rien.
_Shad : Ça risque de m’être difficile…
_Lliane : Pourquoi ?
_Sébastien : C’est une éternelle stressée…
_Rémus : Et bien, concentre-toi sur le bruit des feuilles, l’odeur de l’encens… Fais le vide quoi…

    Les trois humains fermèrent les yeux et laissèrent aller leurs esprits. Au début, des pensées parasites subsistaient : « Est-ce que ça va vraiment servir à quelquechose ? », « J’espère que nous allons réussir à rentrer chez nous… », « Aurais-je aimé devenir vampire ? ». Les minutes passèrent, lentes ; puis les mots perdirent de leur intensité. Ils s’effacèrent lentement, laissant place uniquement à des sensations. D’abord, l’odeur entêtante de l’encens. Puis le bruissement des feuilles, le vent dans leurs cheveux et sur leur peau. Une odeur de sève, de bois, des fleurs… Le chant des oiseaux, des mouvements flous dans les feuillages. Depuis combien de temps attendaient-ils comme ça ? Ils ne savaient pas exactement. Une voix se fit alors entendre. Un murmure plutôt, comme un souffle de vent.

_Lliane : C’est bien… Restez comme ça. Nous allons nous déplacer. N’ouvrez pas encore les yeux. Quand vous nous aurez localisés, pointez du doigt l’endroit où vous nous aurez repérés. Chacun désignera celui ou celle à qui il est lié.

    Un léger bruit parmi les herbes suivit ; Rémus, Lliane et Seichiro n’étaient plus devant eux. Ils ne cachèrent bien sûr pas leur aura, mais ils se déplaçaient relativement furtivement. Attentifs, leurs élèves se concentraient. Le trio d’entraîneurs s’arrêta. Les secondes s’écoulèrent, puis une minute, puis deux. Shad, Rémi et Sébastien pointèrent alors tour à tour un endroit puis ouvrirent les yeux. Ils ne s’étaient pas trompés ; Lliane, Rémus et Seichiro sortirent de la pénombre des arbres. Lliane ne put s’empêcher de plaisanter.

_Lliane : On ne pointe pas les gens du doigt voyons…

    Ils recommencèrent cet exercice de nombreuses fois, Lliane, Seichiro et Rémus rendant leurs mouvements de plus en plus discrets. Il leur fallut ensuite, non plus repérer des personnes fixes, mais en mouvement, ce qui compliqua la tâche. Ils se trompèrent plusieurs fois de personne à suivre, leurs entraîneurs croisant leurs déplacements délibérément. Quand ils furent un peu plus au point, ils firent une pause. Les trois humains se relevèrent, leurs jambes douloureuses après être restés si longtemps assis sur leurs genoux ou leurs honorables fessiers. Ils marchèrent donc autour de la clairière en compagnie de leurs hôtes.

_Lliane : Vous ne vous êtes pas mal débrouillés…
_Seichiro : Moui… Pour des humains, ce n’était pas trop mal.
_Sébastien : En tout cas, nous avons le cerveau aussi engourdi qu’après quatre heures de cours.
_Rémus : Je vous avais prévenus que ça pouvait être fatiguant.
_Seichiro : Avec un bon entraînement, vous pourriez détecter mieux les présences et même plus, mais je ne pense pas que nous en aurons le temps avant votre départ.
_Shad : Qu’entendez-vous par plus ?
_Seichiro : Tout être vivant possède une énergie, un ki, une aura, une âme, ça a différentes appellations et sa puissance et sa nature varient selon l’espèce, l’entraînement subi on encore les prédispositions à la naissance. Les créatures magiques sont naturellement douées pour la ressentir, mais un humain correctement entraîné peut y arriver aussi. La plupart du temps moins précisément, mais c’est faisable.
_Lliane : L’avantage avec vous, c’est que vous nous connaissez, que nous sommes liés. Je pense que c’est pour ça que vous sentez aussi bien notre présence.
_Rémus : Je propose de reprendre l’entraînement.
_Lliane : Tu as raison, ce n’est pas le moment de lambiner.

    Pour recommencer les travaux pratiques, ils mirent carrément des bandeaux noirs sur leurs yeux. Chacune des trois créatures magiques se plaça devant son protégé et fit tournoyer son énergie autour de l’humain, lui demandant d’essayer de décrire ses sensations et d’en donner une image. Ils avaient tous les trois l’impression d’être entourés comme par des rubans intangibles qui formaient une spirale autour d’eux. Par contre, les autres sensations divergeaient.
Pour Shad, elle avait comme une impression de douceur, mais aussi de puissance contenue et aurait donné une couleur argentée teintée de noir au flux. Rémi voyait plutôt un flot blanc zébré de bleu, très lumineux. Pour Sébastien, c’était plutôt bordeaux et fuyant, un peu comme un serpent qui était prêt à attaquer sournoisement. Ils firent de nouveaux exercices dans lesquels ils devaient déterminer par quel côté le flot d’énergie se rapprochait d’eux et à qui il appartenait. Shad « observait », si l’on peut dire, le flot d’énergie de Lliane quand elle sentit quelque chose devant eux, quelque chose qui se déplaçait. Cette présence ressemblait pour elle à la lanterne qui se déplace en sautant dans le voyage de Chihiro.

_Shad : Quelqu’un arrive, non ?
_Lliane : Oui… Vous pouvez enlever vos bandeaux.
_Rémus : Ça fait un moment que c’est entré dans la forêt.
_Seichiro : Vue la façon dont nous avons libéré notre énergie pour qu’ils puissent la visualiser, toute la forêt doit savoir que nous sommes là.
_Rémi : Savez-vous qui c’est ?
_Rémus : J’ai bien une idée, oui…
_Lliane : L’après-midi risque de se terminer dans l’agitation…
_Seichiro : Oh ! Nom de Zeus…

    Des bruits de pas rapides se firent bientôt entendre, ainsi que le bruit des plantes bousculées au passage. La créature sortit alors dans la clairière en se manifestant bruyamment à ceux qu’elle avait devant elle.

_Iris : BONJOUR TOUT LE MONDE !!!

    La jeune fée avait bondi hors des arbres, habillée en petit chaperon rouge avec une mini-jupe marron ornée d’une ceinture rouge, un chemisier blanc, des guêtres et des gants allant du coude à la base des doigts, marrons rayés de blanc, de petites chaussures marrons et la traditionnelle cape rouge avec une capuche rabattue sur la tête. Elle portait bien sûr un panier en osier.

_Lliane : Bonjour Iris. Qu’est-ce qui t’amène ici ?
_Iris : Et bien, comme nous autres les fées nous sommes très nature, forêt, je viens souvent faire un tour par là. Et puis, je vous ai reconnus quand vous avez libéré votre énergie. Comme c’est l’heure de manger, je pensais que vous pourriez pique-niquer avec moi.
_Rémi : C’est vrai que j’ai faim… Quelle heure est-il ?
_Seichiro : Dix-neuf heures trente.
_Rémi : Déjà ?!
_Shad : Et nous sommes là depuis quoi, quinze heures ?
_Rémus : C’est à peu près ça.
_Sébastien : Quatre heures trente d’entraînement ? Ça explique pourquoi je suis si vidé…
_Iris : Alors vous venez ?

    La fée leur tourna autour, passant de l’un à l’autre pour les inciter à accepter, ce qu’ils finirent par faire. Elle sortit alors de son petit panier, à l’évidence ensorcelé comme un sac sans fond, une grande couverture qu’elle posa à terre et une dizaine de boîtes de bento, des baguettes et des couverts ainsi que de petites assiettes en céramique.

_Iris : Itadakimasu !!! Régalez-vous, il y en a pour tout le monde !!!
_Rémi : Euh… Avais-tu prévu tout ça pour toi toute seule ?
_Iris : Ben non, quand même pas. Je vous ai dit que nous les fées, nous sommes très green peace, donc d’habitude, j’invite des animaux ou des esprits naturels au hasard. Je déteste manger toute seule, mais ça ne grouille pas d’élèves en forêt.
_Sébastien : Et est-ce toi qui a tout préparé ?
_Iris : OUIIIIIIIIIII !
_Lliane : C’est délicieux. Merci de nous avoir invités.
_Rémus : Surtout que nos estomacs commençaient sérieusement à nous rappeler l’heure.
_Shad : Et il n’y a pas la galette et le petit pot de beurre ?
_Iris : Toi, tu as remarqué mon costume ! Il me va bien, hein ? Je l’ai commandé chez Gally et Miyako !
_Sébastien : Tu es très mignonne comme ça.
_Iris : Merciiiiiiiiiiii !! Mais au fait, que faites-vous quoi tous dans la forêt ?
_Seichiro : Nous étions en plein entraînement spirituel.
_Iris : Je vous ai dérangés alors… ?
_Lliane : Mais non, voyons… Nous y étions depuis plus de quatre heures, nous allions arrêter.
_Iris : Ah ben, tant mieux alors !!
_Seichiro : Elle ne reste pas longtemps triste celle-là…

    Le repas continua dans la bonne humeur. Mais une fois les mets terminés, il n’était pas question de s’en aller comme des voleurs.

_Iris : Allez tout le monde ! Après un pique-nique avec une fille habillée en petit chaperon rouge, il faut chanter des comptines !
_Tous : Pardon !?
_Iris : Mais oui, voyons !! Après un pique-nique champêtre, on chante des chansons paillardes datant d’il y a cinquante ans, après un dîner d’anniv, on met la musique du moment et des chansons débiles faites pour danser à fond, après un dîner chic, on met des valses, des tangos… Enfin voilà quoi !
_Rémi : Oh pitié… Pas ça !
_Shad : Et si on ne sait pas chanter ?
_Iris : Ah ! C’est toi qui as cherché à fuir la première !
_Shad : Moi !?
_Sébastien : Aller, fais-nous entendre ta jolie voix !
_Rémus : Il faut jouer le jeu maintenant…
_Shad : Mouais… Vous êtes trop contents de ne pas ouvrir le bal…
_Iris : Une chanson ! Une chanson !
_Lliane : Tu sais, si tu ne chantes pas maintenant, elle risque de t’avoir à l’usure…
_Shad : Quand tu dis ça, ça me rappelle ma petite sœur… C’est marrant parce qu’elle m’a eu à l’usure que je me suis inscrite sur Gwendalavir…
_Lliane : Attention, je vais me vexer…
_Shad : Ne dis pas ça, ce n’est pas ce que j’ai voulu dire.
_Iris : Tu changes de sujet…
_Shad : Bon, d’accord…   Dans la forêt lointaine, on entend le coucou. Du haut de son grand chêne, il répond au hibou. Coucou hibou, coucou hibou, coucou couli coucou. Coucou hibou, coucou hibou, coucou couli coucou.   Et voilà comment se payer la honte…
_Lliane : Mais non, c’est amusant.
_Seichiro : Je reconnais bien là votre charmant côté gamin.
_Iris : Yeah !!! Maintenant, c’est à toi !!
_Rémus: Pourquoi moi !?
_Shad : Parce que tu es un méchant qui m’a livrée à ce jeu pour ne pas passer en premier.
_Rémus : Oui, bon… Attendez, ça remonte à loin pour moi les comptines, je n’ai pas vraiment connu mes parents… Euh…  Un petit oiseau a pris sa volée, un petit oiseau a pris sa volée. A pris sa, à la volette, a pris sa à la volette, a pris sa volée…  
_Seichiro : Il me semble qu’elle est plus longue que ça…
_Rémus : Sûrement, mais c’est tout ce dont je me souviens…
_Shad : A qui le tour… ?

    À force de harcèlement, Iris finit par faire chantonner tout le monde. Il était alors vingt-deux heures et donc temps de rentrer aux dortoirs. Ils firent la route ensemble à travers les arbres, le parc du château, et enfin le grand hall et les escaliers de l’aile droite. Shad, Rémi et Sébastien laissèrent Lliane pour entrer dans leur chambre. Ils se mirent en pyjama et les deux garçons allaient se coucher quand Shad leur rappela :

_Shad : Hey ! Ne vous endormez pas tout de suite ! Nous devons prendre la potion et faire nos exercices.
_Rémi : Bon, la potion, c’est clair qu’il ne faut pas oublier, mais ce n’est pas grave si nous ne faisons pas nos mouvements tous les soirs.
_Shad : Perso, je n’ai pas envie qu’une fois le rituel enclenché, nous perdions le contrôle du peu de pouvoir que nous aurons par manque d’entraînement. C’est pour éviter ça qu’on en chie.
_Sébastien : Aller, ce n’est pas la mort après tout…

    Et c’était parti pour cent abdominaux, les jambes repliées sur le ventre et les bras en croix sur la poitrine. Ils sortirent ensuite leurs armes, faisant quelques mouvements chacun de leur côté, puis Sébastien et Shad s’amusèrent à faire un petit duel qui se solda par un match nul, car ils eurent vite fait d’avoir envie de dormir.

_Shad : Bon ben… Il n’y a plus qu’à boire un coup…
_Rémi : Mouais, il faut bien… En tout cas, le goût de ce truc motive pour le boire tous les soirs, vu que si nous oublions une seule fois, il faudra recommencer à en prendre pendant un nouveau mois.

    Ils trinquèrent alors avec un sourire résigné, et comme chaque fois, celui ou celle qui le boirait le plus vite aurait gagné. Ils avaient instauré ce petit concours pour se donner le courage de boire le liquide au goût indéfinissable. Ils commençaient à ressentir d’étranges picotements lorsqu’ils la buvaient et Seichiro leur avait dit que c’était le signe que la potion commençait à faire effet. Cette fois, Rémi remporta le point ; après quoi, ils allèrent se coucher, bien contents à l’idée que le lendemain serait un dimanche et qu’ils pourraient donc se lever plus tard qu’en semaine.

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